jeudi 14 avril 2005

SAHARA (12) : VANITÉS

Vanité, deuxième.
A Y*** qui ambitionne de devenir "chechologue" avant la fin de la semaine, notre chauffeur amusé conseille de... me regarder. "Elle connaît chèche, dit-il. Pas la première fois en Algérie." Et si, lui dis-je Il s'étonne.
Vanité, oui. A l'éprouver je ne sentais pas de honte, mais à te l'écrire, si.
Passons, donc.
D'une certaine façon, ce n'est effectivement pas la première fois que je viens au Sahara. Enfant, j'étais déjà fascinée par ces lieux et ces peuples, et m'y inventais des aventures, des identités alternatives. Tous mes personnages, ou presque, ont ressenti cette fascination, d'Héloïse à Camille.
Nous avons traversé tout à l'heure un paysage de désert classique, carte postale, dunes blondes et rosées à perte de vue sous un soleil écrasant.
Les grandes étendues plates sont particulièrement enivrantes. Peut-être parce qu'on y voit si loin. Peut-être à cause de la vitesse du 4x4 qui les traverse.
Impression proche, sans doute, de celle des cow-boys découvrant l'Ouest Américain. Une exaltation, une impression de force trompeuse, comme si on pouvait y courir à toute vitesse, soulevé par le vent.
De même, descendre une dune en courant est merveilleux, étonnamment frais, dénouant le chèche enroulé sur nos têtes.
Mais monter une dune, à plus de 40°, même une dune au sable assez compact, monter une dune est une épreuve que seule la perspective de la descente peut justifier.

Le soir. Dans l'auberge la plus hallucinante, la plus pitoyable, la plus cataclysmique, la plus sale, où il m'ait été donné de dormir. Les chambres ressemblent vraiment à des cellules de prison : petites, murs blancs et nus, deux paillasses recouvertes d'un tissu crasseux, une unique ampoule au plafond, une fenêtre — sans volets mais avec barreaux. Rien d'autre. Ah, si : un climatiseur, dont nous avons pour l'instant vérifié les fonctions de chauffage et de ventilation, et l'inquiétant vrombissement. Pour la climatisation, c'est à voir.
Je n'évoque pas l'état du sol, ni des branchements électriques, et moins encore celui des sanitaires (communs). Allez, pour le plaisir : les toilettes des femmes — à la turque — avec un seau pour les rincer — le robinet pour remplir le seau étant fort loin des toilettes, et le seau lui-même... percé.
Cependant nous sommes tous sur la terrasse et nous voyons Bételgeuse.
En contrebas s'étage la ville de Djanet, 8000 habitants, maisons étalées le long de la palmeraie, promenades où passent, comme partout, les jeunes et parfois moins jeunes gens, le soir, par petits groupes. Il y a très peu d'Européens, surtout la nuit, aussi ne passons nous guère inaperçus.
Notre statut d'Européens ne nous permet cependant pas d'approcher la résidence présidentielle. Un militaire empêche son chien de se jeter sur nous et nous explique que "C'est interdit" — calmement, presque aimablement, mais la Kalachnikov à la main.

Aucun commentaire: