jeudi 9 avril 2009

ISTANBUL (8) : DES STEPPES AUX JARDINS

Mon Amour estime que l’étonnant palais de Topkapi évoque l’habitat de nomades soudain sédentarisés. Quelque chose comme des tentes construites en dur (en marbre, même, assez souvent) dressées autour d’espaces ouverts — des cours et des jardins en place de steppes, certes, mais le ciel très présent malgré tout. Des éléments de bois qui nous étonnent, très apparents, aussi travaillés que le marbre (les maisons bourgeoises traditionnelles d’Istanbul sont en bois elles aussi, peintes de couleurs vives).
Peut-être en effet faut-il le garder en mémoire. Comme le père de Jehane lui rappelait en parlant des Asharites : « Souviens-toi qu’ils viennent du désert. »
Se souvenir qu’ils viennent des steppes de l’Est, et qu’ils étaient nomades. Certains restaurants et certains cafés affectent une telle décoration proche de celle des yourtes, poutres de bois sombres, toits et mobiliers aisément démontables.
Mais les Ottomans sont bien plus que cela. Certes le palais de Topkapi est un grand complexe de bâtiments et de jardins plutôt qu’un palais à l’occidentale, comme l’était autrefois le Palais byzantin. Les bâtiments conservent une taille humaine, on passe de l’un à l’autre par des cours ou des jardins très fleuris — les Ottomans aimaient tant les tulipes — il semble que le printemps soit enfin venu, du moins à Istanbul. Nous avons particulièrement aimé que la bibliothèque soit un édifice isolé, au milieu d’un jardin.
Mais les Ottomans n’ont pas attendu Dolmabahçe pour aimer le luxe et la démesure, ni pour s’inspirer de l’Occident : les portraits de sultans étaient commandés à Venise, à l’école de Véronèse, bien avant que les sultans abandonnent les épais caftans cérémoniels pour les étroits pantalons gris et les vestes militaires d’Occident.
Quant à leur sens des proportions, je soupçonne qu’il a été faussé par leur accoutumance à Ayasofya. Ils voient grand. Très grand. Et avec beaucoup de colonnes. On ne peut pas leur en vouloir.

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